C’est avec un large sourire qu’Isabelle Andoh-Vieira a accueilli quelques membres de l’équipe de Fall In Mode dans sa boutique aux Vallons. Dans cette interview, elle se présente, présente sa marque et pose un regard critique sur l’univers du prêt-à-porter.
Veuillez-vous présenter à nos lecteurs.
Je suis Isabelle Andoh-Vieira, styliste modéliste, diplômée es mode dans la spécialisation prêt-à-porter femme. J’ai commencé Ysand en 2007 après mes études à Paris. Notre spécialité, c’est le prêt-à-porter mais nous faisons aussi du sur-mesure. Personnellement, je suis mariée et mère de deux enfants.
Pourquoi vous êtes-vous orientée vers le prêt-à-porter ?
Je suis issue d’une famille de stylistes. Mon grand-père l’était. Ma mère l’est. En tant que styliste, elle avait une boutique de prêt-à-porter. Elle importait des vêtements qu’elle revendait ici. Je l’accompagnais souvent dans ses courses tout en étant curieuse de savoir comment des marques arrivaient à faire des tenues qui puissent être aussi ajustées. J’ai fait une formation de BTS en comptabilité de gestion à la base. Après mon BTS, il fallait que je m’inscrive dans une école. J’ai ressenti le besoin d’apprendre le métier. En troisième année, lorsqu’on m’a demandé de me spécialiser, j’avais le choix entre Nouvelle Couture (qui est haute-couture), enfants et prêt-à-porter. J’ai tout de suite choisi prêt-à-porter parce que c’est tout ce que j’ai toujours voulu faire. Après ma spécialisation, j’ai fait énormément de stages et ensuite, je suis rentrée au pays. J’avais besoin de développer ça à Abidjan et d’ajouter ma touche personnelle.
Est-ce que vous avez toujours eu le soutien de vos parents ?
Oui. Mon père est expert-comptable. Au début, j’ai plutôt suivi sa trace en faisant le BTS en comptabilité. Puis, j’ai voulu évoluer dans la mode. J’avoue que ma mère n’était pas très emballée au début. Elle voulait que je termine en comptabilité et que je travaille dans le cabinet de mon père. Ce dernier par contre, a tout de suite dit oui. C’était important puisque c’est lui qui payait (rires). Finalement, après mon BTS que j’ai fait à Montpellier, j’ai voulu rester dans cette ville que j’avais aimée. Mais quand on veut faire de la mode en France, il faut partir à Paris. J’ai donc passé un test et j’ai été reçue dans une école de la capitale française.
Est-ce que les tenues d’Ysand s’adaptent à toutes les occasions ?
Oui. Exactement. Nous faisons principalement des tenues de ville. Et qui dit tenue de ville dit tenue qui s’adapte à pas mal de circonstances. Vous pouvez en porter pour aller travailler, pour des petites sorties, des cocktails. En dehors de ça, nous faisons des tenues de soirées. Mais nous sommes plus axés sur des tenues de ville.
Et comment décrivez-vous la cliente Ysand ?
La cliente Ysand est une femme classique et chic, qui sait ce qu’elle veut et où elle va. Elle a une forte personnalité et attire l’attention par son attitude et son vêtement sans en faire trop.
Envisagez-vous de produire en plus grande quantité pour toucher un plus large public ?
Bien sûr. Le but est, au fur et à mesure, de pouvoir élargir la production et pouvoir la distribuer dans différentes surfaces et même à l’extérieur.
Mais avant, va falloir trouver les marchés. Pour l’instant, chaque produit sort en moyenne série. Les tenues sont disponibles dans toutes les tailles. Par exemple, pour une tenue, nous faisons 3 exemplaires par taille pour commencer et selon la demande, nous reproduisons afin d’avoir une large proposition en boutique.
Vous n’avez pas peur que ça tombe dans le fast-fashion, comme certains le disent ?
Non. Pour une tenue en particulier, si elle est écoulée en boutique. Nous pourrons ressortir le même modèle mais dans un textile différent. La production de masse va s’imposer pour un marché différent, par exemple pour l’étranger ou pour Jumia. Nous allons faire un modèle qui ne soit pas disponible ici ou du moins dans les mêmes coloris mais dans toutes les tailles et selon la quantité voulue.
Quelle est la plus grande difficulté quand on a une boutique de prêt-à-porter made in Côte d’Ivoire ?
Sans hésitation, le personnel qualifié. Du piqueur au modéliste, il y a peu de personnes formées. Certains ont appris sur le tas. Les personnes avec qui je travaille sont issues de chez Michel Yakice par exemple, elles ont une très bonne base. Ma chance, c’est que j’ai suivi une formation. Alors, je leur apporte la touche Ysand. Dans la maison Ysand, rien n’est fait au hasard. Si tu as l’habitude de faire des coupes à main levée, chez moi tu seras obligée d’apprendre à faire des patronages.
C’est dommage qu’il y ait du coton ici et que nous ayons des problèmes de textiles.
Selon vous, qu’est-ce qui manque à la mode ivoirienne pour en faire une industrie plus forte ?
C’est lié à ce que je viens de dire : la formation. Mais il y a un autre problème. Il s’agit du textile. Il est difficile de trouver les mêmes textiles dans le même coloris quelques mois plus tard. Par exemple, le denim que je porte, il y a peu de chances que je retrouve le même textile et le même coloris. Et c’est pareil pour le wax vu que les collections changent chaque trois mois. C’est difficile de faire de la production de masse dans ce cas. Ainsi, est-on obligé d’en acheter en Chine ou au Maroc. Et là, il faut vraiment en acheter en quantités astronomiques. Dix rouleaux de chaque couleur par exemple. C’est vraiment dommage qu’il y ait du coton ici et que nous ayons des problèmes de textiles. En plus, l’accès au financement reste un point important. Parce que si on n’a pas de financement, on ne peut pas se développer. Nous aimerions bien créer en masse mais il faudrait des machines de qualité. Et ça, c’est de l’argent. C’est vrai qu’Ysand de 2017 n’a rien à voir avec Ysand de 2007 parce que nous avons grandi. Toutefois, ça a pris du temps.
Vous pensez que le problème d’accès au financement est dû à quoi ?
Les structures n’ont peut-être pas confiance. Parce qu’il faut le souligner, ce n’est que très récemment que le domaine de la mode a commencé à susciter l’intérêt. Le ministère de la culture prend conscience. Il y a aussi l’association des créateurs qui se bat également pour nos intérêts. Mais ce sont des choses qui prennent du temps. Il faut que les structures aient confiance. Et là encore, c’est lorsque tu es à un certain niveau que l’on te remarque. Toute la phase où tu commences à monter, tu es livré à toi-même.
Dans le groupe We Fall In Mode, il eut un débat sur l’industrie du prêt-à-porter. Beaucoup ont mentionné le fait qu’il y avait un manque de communication autour de cette industrie.
Euh…Oui. Il y a un problème de communication. Voilà pourquoi Ysand a décidé de communiquer plus autour de ses créations. Mais, les ivoiriens aussi confondent le prêt-à-porter et le prêt à être porté. J’entends par prêt-à-porter un vêtement disponible le même coloris dans toutes les tailles. Exactement le même vêtement. Ce n’est pas une chemise en lin blanche en taille M ou une autre chemise bleu en taille XL. Il y a plusieurs personnes à Abidjan qui prétendent faire du prêt-à-porter alors que ce n’est pas le cas sans vouloir citer personne. Mais voilà, ce n’est pas du prêt-à-porter.
Et quand au problème de prix ?
(Rires) Les prix, c’est relatif. Quand on me dit ça, ça me fait rire. Ces mêmes personnes sont capables d’aller acheter des robes à 70 000FCFA dans des boutiques parce qu’elles sont importées. Mais elles ne peuvent pas acheter des robes produites ici. Pourquoi ? Parce qu’elles sont justement produites localement ? Les prix ne sont pas fixés au hasard. Ça dépend des charges, de la qualité, de la créativité. Je pense surtout que les personnes qui se plaignent ne veulent juste pas en acheter.
Votre dernier mot ?
Je pourrais en parler des heures. (Rires) Je dirai : vive le prêt-à-porter made in CI. Il n’y a que par rigueur, acharnement et passion qu’on pourra y arriver. Et aussi, vive Fall In Mode. (Rires)
Crédit Photo: Philippe Loret Studios
N’hésitez pas à visiter la page officielle de la marque
1 commentaire(s)
For mi da blé ma nièce tu as mon soutien .
Je pense que viens de faire ta correspondance cad tu descends petit avion et la ti vas prendre la A 380 pour la destination mondiale.
Tu seras notre future Dior .
Que la miséricorde de Dieu soit sur toi et toute ta famille .